Salon de Genève annulé, ventes de véhicules neufs en berne, délai de livraison astronomique : le secteur de l’automobile traverse une très forte zone de turbulences.
Un chiffre résume tout, celui du CNPA (Conseil National des Professions de l’Automobile) : -23,2% d’immatriculation de voitures particulières en 2021 par rapport à 2019. Alors que les prévisions de croissance pour la France tournent autour des +6% du PIB. Incroyable ! Surtout quand on sait que depuis la fin de la seconde Guerre Mondiale, jamais les ventes de voitures neuves n’avaient reculé en période de croissance.
Pire, comme l’explique Luc Chatel, président de la PFA (la plateforme automobile), « le secteur de l’automobile est sans doute le seul secteur à ne pas avoir redémarré. » Pourtant, tous les compartiments de l’économie bénéficient du rebond de la consommation qui accompagne cette sortie de crise sanitaire. Alors pourquoi ?
Pénurie de semi-conducteurs
La première raison est justement lié à ce regain de la consommation a l’échelle mondiale qui crée une tension sur certaines matières premières mais aussi une pénurie de semi-conducteurs. Hors des semi-conducteurs il en faut énormément dans nos voitures : jusqu’à 5000 puces pour certains véhicules.
Et certains sont incontournables : actuellement les productions d’ABS (équipement obligatoire) sont interrompus car 2 semi-conducteurs à 4 centimes d’euros chacun sont en rupture. 2 sur les 400 qu’embarque une centrale ABS.
Résultat, cette pénurie va provoquer un problème d’offre : 7 à 8 millions de véhicules ne seront pas produits à l’échelle mondiale en 2021, soit 10% du marché mondial.
Plusieurs analystes prévoit que cette pénurie et la désorganisation des chaines d’approvisionnement se prolongeront sur l’année 2022.
Délai
Au problème de l’offre s’ajoute le problème de la demande. Les délais de production étant rallongés, les consommateurs sont dissuadés. Si vous commandez un véhicule neuf ce mois-ci, il ne sera probablement livré qu’au printemps, voire à l’été 2022.
Conséquence, beaucoup d’automobilistes se tournent vers le marché des véhicules d’occasion dissuader par ces 6 à 9 mois d’attente.
Prix
Selon L’Argus, une voiture neuve coûte en moyenne 7000€ de plus en 2021 qu’en 2010. Là aussi, cette inflation du prix des voitures neuves découragent les consommateurs et leur donne une raison supplémentaire pour se tourner vers le marché de l’occasion ou reporter leur achat s’il le peuvent.
Luc Chatel justifie cette augmentation en rappelant que « dans un Renault Espace d’aujourd’hui, il y a plus de lignes de codes que dans un avion de ligne. Et pas seulement pour des raisons de confort mais aussi de sécurité. Par exemple, prochainement, l’AEB (freinage d’urgence) sera un équipement obligatoire dans toutes nos voitures ».
L’énergie
La rapidité mais aussi les incertitudes liés à l’avènement de la voiture électrique provoquent indéniablement des reports d’achats. Si aujourd’hui vous habitez dans une grande ville ou à proximité, mais qu’il vous arrive de faire de la route pour vos vacances, vos weekends ou vos loisirs, quel véhicule acheter ?
Une voiture électrique doté d’une grande autonomie ? Oui mais ça a un coût et les infrastructures de recharge sont encore médiocres il faut bien le dire (abonnements incompréhensibles, bornes trop rares ou en panne, …)
Un véhicule diesel ? Si vous habitez proche de Paris, mauvaise idée car en 2024 les diesels seront interdits dans la capitale. C’est vrai que tout le monde n’habite pas Paris, mais regardez à quelle vitesse se développe les ZFE (zones à faible émission) un peu partout. Et la perspective du Pacte vert européen est dans la tête de tous les acheteurs. Bref, aujourd’hui être un automobiliste urbain ou péri-urbain devient un enfer.
Un véhicule essence ou hybride ? Le prix de l’essence est aujourd’hui à des niveaux très haut et il n’est pas prévu que ça baisse prochainement. Quant aux hybrides rechargeables, leur surcoût est tel qu’il ne s’avère pas toujours rentable.
En plus des délais de livraison, du prix et de l’incertitude sur le type de motorisation à choisir, les acheteurs potentiels sont complètement découragés et préfère ne pas acquérir ou ne pas renouveler leur voiture.
En clair, un problème sur l’offre (pénurie de voitures disponibles) + un problème sur la demande (« pénurie » d’acheteurs) = une crise après la crise.
Et cette crise ne touche pas que la France. En septembre 2021, les chiffres sont catastrophiques un peu partout en Europe :
- – 16% en Espagne
- – 33% en Italie
- – 34% au Royaume-Unie
- – 25,7% en Allemagne soit seulement 200 000 ventes Outre-Rhin en septembre 2021, du jamais vu depuis 30 ans !
Quand le produit offert ne correspond pas à la demande et bien cela ne se vends pas.
Et comme une grande majorité n’est pas intéressé par l’électrique ou l’hybride, le consommateur attends le bon produit.
Certains constructeurs commencent à avouer qu’ils sont dans l’erreur en satisfaisant les exigences des gouvernements en termes de gamme et du coup vont devoir reprendre la production des diesels et suv.
Tout le monde ne peux pas rouler en électrique, surtout pour travailler ou les loisirs.
Comment mettre un bateau à l’eau avec une voiture électrique ? Risqué non ?
On est bien d’accord. Nous pensons qu’il est illusoire de penser qu’il n’y aura qu’une seule source d’énergie pour la mobilité. Le diesel a prouvé ses qualités pour certains usages. Et pour d’autres usages, l’électrique doit être la règle. Entre les deux, il y a de la place pour beaucoup d’énergie : essence bien-sûr, mais aussi hydrogène, sans oublier l’E85.